es | eus | fr | uk

ECOUTES TÉLEPHONIQUES /AUTORISATION JUDICIAIRE /ARRÊT DE LA CEDH (31 MARS)

Saisie d’une requête dirigée contre la Lettonie, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 31 mars dernier, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (Šantare et Labazn¸ikovs c. Lettonie, requête n°34148/07 - disponible uniquement en anglais). Les requérants, de nationalité lettone, ont fait l’objet de poursuites pour corruption, lesquelles avaient été déclenchées à la suite de l’écoute de leurs conversations téléphoniques menées par l’autorité administrative en charge de la lutte contre la corruption. Après le refus du procureur de communiquer un document attestant de la légalité de l’interception des communications, les requérants alléguaient que le dossier pénal ne contenait aucune autorisation de mener des écoutes, ce qui constituait une violation de l’article 8 de la Convention. La Cour constate que les écoutes ont constitué une ingérence dans le droit au respect de la vie privée des requérants. Elle examine, dès lors, si cette ingérence était prévue par la loi. A cet égard, elle rappelle que cette obligation implique des conditions qui vont au-delà de ce que prévoit la loi nationale et que celle-ci doit être accessible et prévisible. Or, la condition de prévisibilité impose que la base légale donne aux citoyens une indication adéquate des circonstances dans lesquelles une autorité publique a le pouvoir d’ordonner de telles mesures. La Cour rappelle, également, que si la condition d’une autorisation judiciaire n’est pas, en soi, une condition de validité, le fait que la mesure fasse l’objet d’un examen juridictionnel constitue une garantie importante contre le caractère arbitraire d’une mesure de surveillance. L’effectivité d’un tel contrôle doit permettre au juge de vérifier si la mesure contestée a été légalement ordonnée et exécutée. Concernant l’application des principes en l’espèce, la Cour note que le dossier pénal ne contenait aucune référence à une autorisation judiciaire de la mesure d’écoute. Elle en conclut que, durant toute la procédure, les requérants n’ont pas pu vérifier que l’ingérence dans leur droit garanti par l’article 8 de la Convention a été menée sur la base d’une autorisation judiciaire. Elle constate que, contrairement aux dispositions du droit national, les juridictions n’ont pas assuré un recours juridictionnel effectif de la légalité de la mesure contestée et n’ont, dès lors, pas joué leur rôle de garantie supplémentaire contre l’arbitraire. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 8 de la Convention. (JL)

2016-05-03